Opticien Balaruc-le-Vieux Cc Carrefour - Krys
Marion V
Implants rétiniens : “assez d’acuité pour reconnaître des proches”
Rendre une partie de leur vue aux aveugles. C’est une part du travail de recherche réalisé par l’équipe de Serge Picaud, à l’Institut de la Vision à Paris. Plusieurs axes sont étudiés. Celui des implants rétiniens vient d’être validé en 2018. Vers une mise sur le marché prochaine ?
En illustration : implant rétinien miniature de nouvelle génération totalement sans fil ni connexion, Prima de Pixium Vision. Cette micro-puce photovoltaïque d'épaisseur 2 millimètres et 30 microns, et constituée de 378 électrodes, est implanté sous la rétine par chirurgie peu invasive. Elle convertit le signal infra-rouge, reçu d’un projecteur miniaturisé fixé sur une paire de lunettes munie d’une mini-camera, en un signal électrique transmis au cerveau par l’intermédiaire du nerf optique. Prima est destiné au traitement des dystrophies rétiniennes.
Serge Picaud, directeur de recherche (Inserm) - Nous cherchons les réponses à plusieurs questions. La première est de comprendre la vision humaine. En effet, on ne sait pas encore exactement comment la rétine conditionne les informations visuelles pour les envoyer au cerveau, comment le cerveau les interprète pour offrir cette image parfaite. La deuxième question consiste à savoir comment les pathologies influencent ce traitement de l’information visuelle, et à trouver des stratégies thérapeutiques pharmacologiques qui vont ralentir l’évolution de ces pathologies. Une autre question a pris une importance majeure : lorsque les patients sont devenus aveugles, nous cherchons comment réactiver le circuit qui ne reçoit plus d’informations visuelles.
En effet, cette startup a produit l’implant. Après différentes phases de tests électroniques, mais aussi de vieillissement accéléré, mon équipe l’a validé sur des rétines ex vivo et in vivo. Aujourd’hui, il est testé dans des essais cliniques sur des patients aveugles, atteints de dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA). Avec l’implant, certains patients lisent déjà des mots, trouvent des formes. L’idée à terme est d’essayer de leur permettre de reconnaître leurs proches, de se déplacer et aussi de saisir les éléments du quotidien.
Leur vision est plutôt en noir et blanc car les circuits colorés ne sont pas stimulés sélectivement. C’est une vision très pixelisée. L’implant actuel de référence étant muni de 60 électrodes, il faut s’imaginer un puzzle de 60 pièces blanches ou noires. La résolution n’est pas bonne pour un voyant, mais pour un aveugle, c’est déjà beaucoup : un des patients implantés m’a dit, “j’adorais skier, je ne pouvais plus. Maintenant, avec cet implant je peux suivre un pilote, je le vois se dégager sur la neige et ça me suffit. Skier est le plus grand bonheur de ma vie.”
Avec 600 pixels, des études psychophysiques indiquent que l’on pourrait réaliser la majorité des actions du quotidien. Et cela paraît atteignable. Dans nos essais cliniques, les nouveaux implants offrent déjà 378 pixels. Le mouvement augmente la résolution car le cerveau moyenne ce qu’il perçoit donnant ainsi une perception plus fluide. On atteint une gamme où le patient pourrait se remettre à lire, à reconnaître des visages, à retrouver une locomotion indépendante.
Implant du système de vision bionique Prima de Pixium Vision.
C’est une chirurgie assez simple pour un chirurgien expérimenté qui pratique dans un centre d’excellence : il décolle et incise la rétine puis glisse l’implant. La rétine se recolle ensuite dessus. Beaucoup de patients pourraient en bénéficier, beaucoup sont demandeurs. Les résultats sont très bons mais sur un nombre très limité de patients, il faut donc les valider dans un essai européen multicentrique avant la commercialisation.
L’autorisation de mise sur le marché devrait intervenir dès cette année, en 2019. Il faudra ensuite définir les critères d’éligibilité. Imaginons que 100 000 patients soient concernés en France, c’est aussi toute une filière à créer. L’implant fonctionnant de pair avec des lunettes spécifiques, il faut aussi prévoir de former un opticien dans chaque ville moyenne. Cette technologie devrait donc aussi rapidement bénéficier aux patients atteints de pathologies héréditaires induisant une perte des photorécepteurs comme la rétinopathie pigmentaire.
Interview de Serge Picaud, directeur de recherche (Inserm), propos recueillis par Le Guide de la Vue le 28 janvier 2019 à l’Institut de la Vision, Paris.
Crédit photo : © Inserm/Laurence Prat
Construit au cœur du Centre Hospitalier National d’Ophtalmologie (CHNO) des Quinze-Vingts à Paris, l’Institut de la Vision est l’un des plus importants centres de recherche scientifique et médicale en Europe entièrement dédié aux maladies de la vision.
Des nouvelles expérimentations réalisées par des médecins américains offrent des espoirs de traitement de la DMLA.
Marion V
Elisabeth G
Anne-Laure P
Aurélie C